[Edito] Marketplaces et services gagnants de l'e-commerce
Historiquement, la rentabilité de la distribution ne provenait pas uniquement de la vente de petits pois ou de tout autre produit. Les bénéfices venaient aussi d’une inflation galopante (avec des stocks spéculatifs), de délais de paiement à rallonge ou des loyers des galeries commerciales. Sans oublier la vente de services avec, jadis, ces fameuses marges arrière qui n’ont pas totalement disparu ou qui ont pris d’autres formes. Aujourd’hui, de tels raisonnements perdurent et l’e-commerce ne cesse de développer cette catégorie dite des « revenus autres ». Il ne faut pas perdre de vue que la croissance des marketplaces est d’abord basée sur des royalties, ces commissions que touche l’e-commerçant. Ce dernier ne vend pas directement un produit mais vante les mérites de son trafic à un fournisseur qui y trouve intérêt et s’affiche sur ladite place de marché. Ce « vendeur tiers » verse alors une commission de 5 à 15 % de son chiffre d’affaires à l’hébergeur.
Ce n’est pas tout. Les géants de l’e-commerce peuvent aussi se charger de la logistique (stockage, livraison, retours…), qui devient une source de revenus complémentaires grâce à ces services dits de « fulfillment ». Amazon ou Cdiscount permettent aussi à leurs fournisseurs d’être visibles en tête de page dans cette catégorie appelée « articles sponsorisés ». Et ce, bien sûr, moyennant finance.
Et n’oublions pas le cloud, vrai vache à lait d’Amazon. À tel point que c’est au patron de cette division, Andy Jassy, que le fondateur, Jeff Bezos, a cédé la direction générale du groupe. Il ne lui a pas échappé qu’Amazon Web Services (AWS), la branche de stockage et traitement des données en ligne, totalise près des deux tiers du résultat net global de la multinationale. Par quel miracle ? En proposant toujours plus de services aux entreprises (de l’envoi d’e-mails en passant par des campagnes de marketing digital jusqu’au machine learning ou de la réalité augmentée). Tous les grands e-commerçants ont compris l’intérêt de ce « cloud computing » et avancent avec des propositions de valeur identiques ou différenciantes. Comme Cdiscount, qui présente une solution de marketplace BtoB.
Pour eux, l’immatériel prend le pas sur le matériel. La vente de produits n’étant plus qu’un « mal nécessaire » : celui qui génère du trafic et accumule de la data. Certains décideront de ne pas passer à 100 % marketplace, tels ces distributeurs qui conservent des magasins intégrés pour disposer en interne d’un savoir-faire et parient aussi sur la franchise pour aller plus vite, tout en limitant les risques financiers. Mais d’autres n’auront pas ces « pudeurs de gazelle ». Ils finiront bien par avouer qu’ils ne sont plus des commerçants, mais qu’ils sont devenus – ou ont toujours été – des prestataires de services, déléguant à d’autres ce qu’ils ne veulent ou ne peuvent pas faire.
C’est ainsi que s’annonce une nouvelle bataille non pas entre commerçants, mais entre ceux qui vendent des produits et ceux qui proposent des services, entre ceux qui courent après le chiffre d’affaires et ceux qui galopent après le volume d’affaires. Sans oublier ceux qui miseront toujours et encore sur les deux tableaux. Avec, à l’horizon, une féroce concurrence ou quelques alliances stratégiques entre ces deux visions d’un monde en pleine ébullition.
ypuget@lsa.fr @pugetyves
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